Thierry Beaudet

Quelles sont les attentes et les objectifs du nouveau président du CESE, alors même que celui-ci vient d’être réformé ?  Thierry Beaudet répond ici à 3 questions de Bernadette Groison.

1- Vous avez été élu depuis peu Président du CESE, alors même que celui-ci vient d’être réformé, quelles sont vos principales attentes et quels sont vos objectifs pour ces 5 années à venir ?

Le CESE est une institution que je connais bien, pour y avoir siégé dans une mandature précédente, et à laquelle je suis très attaché. Le nouveau CESE, renouvelé et réformé, démarre sa mandature dans un moment particulier où la société française est traversée par un profond sentiment d’incertitude. Beaucoup sont celles et ceux parmi nos concitoyennes et nos concitoyens qui ne se sentent ni écoutés, ni suffisamment représentés. Ma conviction est que le CESE a un rôle important à jouer pour réconcilier les Françaises et les Français avec la fabrique de la décision publique, et pour aider au consentement, à l’adhésion et à l’acceptabilité des réformes. Je veux un CESE efficace et utile à la démocratie, qui cultive son sens du dialogue, son sens du futur et celui du projet partagé. Un CESE pleinement engagé dans la relance et qui pèse dans le débat public, tourné vers le monde et en prise avec la société. Nous organiserons d’ailleurs le 12 octobre notre Conférence des Enjeux. Elle sera l’aboutissement de plusieurs semaines de travail des conseillères et conseillers du CESE sur les grands défis que devra relever notre société au service des prochaines générations. Ces travaux serviront de socle à la définition des orientations stratégiques qui encadreront nos travaux tout au long de la mandature.

2- Alors que notre pays doit réussir un certain nombre de transitions, il traverse une période de crises à multiples facettes aggravées parfois par la pandémie. Quel rôle doit et peut jouer le CESE face à cela ?

J’identifie trois défis majeurs, un défi écologique que plus personne ne peut ignorer, un défi économique et social alors que la crise a touché plus durement les plus fragiles et un défi de revitalisation de la démocratie. J’ai la conviction profonde qu’il est urgent de passer d’une démocratie par spasmes, dans laquelle l’élection présidentielle est finalement le seul vrai rendez-vous, à une démocratie mixte et continue. Le CESE fait partie des lieux privilégiés où peut vivre le dialogue démocratique. Il s’agira aussi d’aller chercher la parole de ceux qu’on entend trop peu. Si la récente réforme du CESE l’a conforté comme chambre de la société civile, elle lui donne par ailleurs la possibilité d’enrichir ses travaux en y intégrant la parole du public. Cela présuppose d’inventer de nouvelles méthodologies, d’expérimenter, d’innover pour trouver les bons outils, les bons canaux, les bons formats. Le CESE est un lieu de coproduction de solutions, des solutions qui prennent en compte l’expertise technique, via les programmes d’auditions, l’expérience de terrain des organisations représentées au sein de notre assemblée, et le ressenti des individus.

3- Le CESE est la chambre de la société civile ce qui implique une grande diversité de points de vue parfois même antagonistes. N’est-ce pas un frein pour que cette chambre pour soit réellement utile aux décideurs comme aux citoyen-es ?

Au contraire, c’est ce qui fait sa spécificité et sa force ! Nulle part ailleurs autant de facettes de la société ne sont représentées. Charge à nous d’aller chercher le consensus exigeant plutôt que l’exigence de consensus à tout prix. Le CESE est une assemblée composée de femmes et d’hommes au contact du réel. Ils et elles sont issus des représentants des salariés, des entreprises, de la vie associative, d’ONG. C’est l’assemblée de la société agissante. C’est parce que nous avons cet ancrage que nous savons nous saisir des sujets de préoccupations de nos concitoyens et contribuer à trouver des solutions concrètes pour accompagner les grandes transitions que nous sommes en train de vivre, qu’elles soient démographiques, numériques ou écologiques.