Patrick Bernasconi

Patrick Bernasconi est chef d’entreprise; il a été élu président du CESE en décembre 2015 lors du renouvellement du conseil. Le 28 février 2017 une séance a été consacrée au bilan de la première année de mandature du CESE. Nous lui avons demandé de revenir sur ce bilan mais aussi de tracer les perspectives qu’il envisage pour les années à venir.

 

1) Quels sont les traits saillants du bilan de cette première année ?

Je dirais volontiers que nous avons mis en place les fondamentaux pour notre mission. Le premier de ces fondamentaux a été de voter nos axes stratégiques pour la mandature avec notamment deux grands thèmes : le thème de la cohésion sociale, dont on voit bien qu’il a traversé quasiment tous les sujets abordés par le CESE au cours de cette année, et celui des grandes fractures auxquelles nous sommes confrontés.

Le second axe sur lequel nous nous nous sommes mobilisés, est notre volonté d’avoir plus de visibilité et de voir nos préconisations davantage reprises. Pour ce faire nous avons pris le parti délibéré d’aller chercher auprès du gouvernement plus de saisines qu’auparavant pour rééquilibrer les plateaux de la balance entre saisines gouvernementales et auto saisines. Il ne s’agit pas de basculer vers un travail uniquement sur saisine comme c’est le cas pour le CES européen mais de rechercher un équilibre où nous continuerons à garder l’initiative sur un certain nombre de sujets mais où les saisines gouvernementales nous permettent dans de nombreux cas une meilleure temporalité et plus de préconisations reprises. Il est à noter que lorsqu’on regarde le bilan établi par le secrétaire général du gouvernement pour 2016 on se rend compte que cela a plutôt bien fonctionné : un grand nombre de préconisations ont été reprises, par exemple sur la culture du dialogue social ou le socle européen des droits.

Enfin il y a deux points sur lesquels nous nous sommes investis. D’abord l’évaluation des politiques publiques: dès le début 2013 Manuel Valls avait annoncé une saisine conjointe Cour des comptes et CESE ; « la co-production » entre une juridiction et une institution est un peu compliquée mais après discussion nous avons trouvé un mode opératoire et nous allons ainsi travailler sur trois sujets sur lesquels la Cour a donné des avis budgétaires et comptables et pour lesquels le Cese donnera l’avis plus qualitatif de la société civile. Dans le même esprit nous avons mis en place un travail avec le Défenseur des droits. Dans les prochains jours, nous serons en mesure de formaliser des travaux en lien avec France Stratégie.

Le dernier point est comment se reconnecter davantage avec les citoyen.ne.s, comment être plus proche d’eux sans perdre notre ADN d’assemblée de la société civile organisée, c’est à dire les « corps intermédiaires » ? C’est le sujet de la plate-forme citoyenne.

2) Justement où en est-on des outils que le CESE veut se donner ?

Tout d’abord, il s’agit de créer une plate-forme qui va nous permettre de tester nos préconisations et nos analyses et d’associer mieux les citoyen.ne.s à nos travaux.

Puis nous devons mettre en place un autre outil, au service de la pétition citoyenne* qui permettra de saisir directement le CESE : l’idée est d’avoir notre propre plate-forme de pétition pour valider l’authenticité des pétitionnaires, dialoguer avec eux, s’assurer qu’on puisse répondre autrement que par oui ou non…Il y a un certain nombre de principes à respecter, de précautions à prendre mais l’idée est bien d’un plate-forme qui accueille des pétitions numériques. Pour cela il faut une modification de l’actuelle loi organique : nous souhaiterions que cela intervienne dans l’été pour être opérationnels dès 2017.

Nous allons aussi mettre en place une veille sur les pétitions qui circulent sur internet et il nous faudra être en capacité de nous saisir de certains sujets dont elles révèlent l’importance.

C’est un vrai champ qui s’ouvre devant nous et qui peut avoir des conséquences très positives.

3) A partir de là une dernière question : quelles perspectives en termes de meilleures relations entre le CESE et la société civile ?

Le CESE représente la société civile organisée, avec ses associations, ses organisations. Ainsi si nous avons le souci, comme je viens de l’évoquer d’être connectés directement aux citoyens et à leurs préoccupations, si nous souhaitons garder via les saisines un lien plus direct avec les pouvoirs publics, il nous faut aussi nous connecter plus fortement aux organisations. D’où l’idée d’avoir un conférence annuelle avec les « numéros un » des différentes organisations représentées au CESE pour réfléchir collectivement sur quelques sujets que nous avons besoin de traiter ensemble, pour établir en quelque sorte une feuille de route tant à destination du gouvernement que pour organiser nos travaux, et pour répondre au mieux à notre mission au service du pacte démocratique. Bref un moment d’échange, plus fort que ce nous avons aujourd’hui, sur le travail que nous avons déjà fait et celui qui sinscrit devant nous, sur les pistes à explorer etc… Tout en conservant notre autonomie, il est important d’avoir cette connexion**.

Par Gérard Aschieri

*la loi prévoit que le CESE peut être saisi par voie de pétition rassemblant au moins 500000 signatures

**depuis cet entretien P Bernasconi a annoncé son intention d’organiser une telle conférence dès juillet