Les violences faites aux femmes, plus nombreuses en outre-mer que dans l’Hexagone

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a voté un avis à l’unanimité moins une abstention pour combattre les violences importantes subies par les femmes dans les territoires d’outre-mer en sollicitant l’aide financière de l’Etat.

Alerté en 2014 au sujet des violences dans les territoires ultramarins dans une première étude « Combattre toutes les violences faites aux femmes, des plus visibles aux plus insidieuses » réalisée par Pascale Vion, Manuel Valls alors premier ministre , a saisi en juillet 2016 le Conseil  plus précisément sur «Combattre les violences faites aux femmes dans les outre-mer» dont le rapport a été confié à  Dominique Rivière, membre de la délégation à l’outre-mer, et à Ernestine Ronai, personnalité associée au sein de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité. L’avis en question rappelle  que la  Polynésie et la Nouvelle Calédonie  ont un taux  d’agressions physiques jusqu’à 8 fois plus important qu’en métropole. A noter que le travail du CESE s’est appuyé sur une saisine du CESE  de Nouvelle Calédonie sur le sujet. (http://www.ces.nc/portal/page/portal/ces/). En Martinique, les violences sexuelles sont également beaucoup plus nombreuses tandis qu’à la Réunion, les taux d’agressions physiques et sexuelles restent assez similaires à ceux de l’Hexagone et donc bien évidemment trop élevés. Quant à Mayotte, il n’y a pas d’enquêtes générales, d’où la nécessité  de développer, d’uniformiser et de coordonner les outils statistiques sur l’ensemble des territoires français. Le taux de coups et blessures volontaires dans la famille est également nettement plus grand dans 8 des 11 territoires d’outre-mer que dans l’Hexagone. Ces disparités s’expliquent, selon les rapporteur.e.s, par le poids des représentations sociales liées à l’histoire de ces territoires : la colonisation, une histoire locale différente, l’esclavage ou encore le travail forcé. Ensuite, la domination des hommes sur les femmes renforcée par les traditions d’origine.

Le  CESE propose de développer  6 axes de travail. Outre  le développement des outils statistiques «pour améliorer la connaissance de l’ampleur des violences faites aux femmes dans les outre-mer» avec le déploiement total de l’enquête Violence et rapport de genre (Virage) de l’Ined, et la mise en place d’un annuaire national des structures accompagnant les femmes victimes de violences, le CESE  recommande la coordination des acteurs concernés ainsi que la mise en place d’un Observatoire territorial des violences faites aux femmes dans chacun de ces lieux. La formation des professionnels (médecins mais aussi policiers, gendarmes  et magistrats…) est essentielle à  la prise en charge efficace des femmes Un travail de prévention et de sensibilisation de la population et notamment de la jeunesse par le biais de campagnes d’information doit être également développé car «les préjugés sexistes jouent un rôle dans la façon dont chaque personne se construit», tout en renforçant l’éducation à la sexualité. D’ailleurs, à Mayotte, une telenovela est programmée sur le sujet. Enfin, des lieux d’accueil, d’orientation et de mise en sécurité doivent être mis au service de ces femmes dans les territoires d’outre-mer. Même chose pour le dispositif téléphone grave danger, uniquement disponible  sur l’île de la Réunion. Ces préconisations ne peuvent être suivis d’effets sans la mise à disposition de moyens; or le ministère des Droits des femmes disposait d’un budget de  30 millions d’euros pour 2017… le plus petit budget de l’Etat !D’ici dix-huit mois, une première évaluation des effets sera mesurée. «Certes, c’est un délai court mais il faut alimenter la dynamique», estime la rapporteure.

Pour contribuer à « alimenter la dynamique » il semble bon de rappeler qu’en France, une femme décède tous les trois jours sous les coups de son conjoint, que près de 216 000 femmes, âgées de 18 à 75 ans, sont soumises à la violence physique et/ou sexuelle de leur ancien et actuel conjoint, qu’il soit mari, concubin, pacsé, petit-ami… La majorité reste muette, pour protéger leurs enfants, leur réputation ou leur vie, par crainte des représailles. Souvent, ces hommes violents possèdent également une emprise psychologique très forte qui plonge leur victime, isolée, dans un climat de peur permanent. Seules 16% d’entre elles déposent plainte, selon les chiffres du gouvernement.

A voir absolument sur le site du CESE  le témoignage sur 30 ans  de violences faites à une femme qui a accepté de témoigner   recueilli auprès du journal L’humanité.fr

Par Eliane  Lancette

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