Elodie Martinie-Cousty

A l’occasion de l’élaboration de la Stratégie nationale pour la biodiversité par la France pour la période de 2021 à 2030 quels en sont les enjeux ? Quelle contribution du CESE ? 

Le CESE a jugé important de répondre à la demande de ministre en charge de la Biodiversité pour contribuer à l’écriture de la Troisième Stratégie Nationale de la Biodiversité dite SNB3 pourquoi ?

La biodiversité rend des services irremplaçables à l’humanité: 55% du PIB mondial dépend d’une biodiversité en bon état, 80 % des emplois français en dépendent, dont 10% directement. Le CESE a déjà contribué par de nombreux avis, dès 2013, à la nécessaire prise en compte de la biodiversité, de sa protection, aujourd’hui reconnue comme l’enjeu capital de notre survie sur la planète au même titre que l’atténuation du changement climatique. En contribuant à la SNB3, le CESE valorise les recommandations émises dans ces précédents avis avec l’ambition d’aller plus loin dans des recommandations qui arriveront à temps pour sa construction.

Quels sont les principaux constats sur les politiques actuelles de biodiversité ?

« La biodiversité c’est notre assurance vie » dit la Commission européenne en 2012, alors qu’elle subit un véritable effondrement, une sixième extinction de masse selon l’IPBES. La France a une responsabilité majeure dans la préservation de la Biodiversité car c’est un des pays au monde qui a la chance de posséder une diversité incroyable d’espèces grâce à des espaces terrestres et marins sur les 5 continents. Malgré ses engagements internationaux et les lois pour la Nature de 1976 jusqu’à la loi pour la reconquête de la biodiversité en 2016, la France peine à freiner le déclin de la biodiversité par manque de cohérence entre les différentes politiques publiques : agricole, aménagement, transports… par manque de moyens humains et financiers, de portage politique au plus haut niveau de l’État et à l’interministériel.

Comment faire de la biodiversité un projet collectif et fédérateur ?

Comme le Climat, la Biodiversité nous concerne tous, il faut donc en faire un projet collectif et fédérateur et profiter de cette SNB3 pour la sortir du cercle encore trop fermé des spécialistes. C’est pourquoi la biodiversité doit être un élément fondamental de l’Éducation, du primaire jusqu’à la formation professionnelle, dans les entreprises, les organisations auprès de l’ensemble des élus dans les territoires du local au régional, pour les salariés du public et du privé en charge de l’instruction des projets, plans et programmes et un enjeu majeur au sein des services de l’État. La loi de 2016 impose zéro perte nette de biodiversité dans les projets. Cela nécessite une bonne connaissance de la mise en œuvre de la séquence ERC (Éviter, Réduire Compenser – Éviter la perte nette de biodiversité) et un accompagnement constant des services de l’État ou des associations de protection de la Nature vers les professionnels, dans un partenariat de long terme.

Quels moyens nécessaires à cette mise en œuvre ?

Si les enjeux de biodiversité doivent être mieux portés au niveau international, européen et national, ils vont se décliner principalement au sein des régions au travers des agences régionales de biodiversité quasiment toutes mises en place maintenant. Des SRADDET jusqu’aux PLUs, tous les documents de planification et d’urbanisme doivent intégrer ces enjeux, et aussi en mer, au travers des documents stratégiques de façades et les documents de bassins ultra-marins. Ces documents de planification doivent intégrer une gouvernance qui associe les parties prenantes, dans un meilleur équilibre : élus, scientifiques, associations de protection de la nature, entreprises, syndicats, citoyens … pour partager la connaissance, les axes de recherche et prioriser les plans d’actions. Tout ceci nécessite des moyens d’accompagnement humains et financiers qui font cruellement défaut à tous les niveaux. Une loi de programmation financière pluriannuelle doit accompagner cette stratégie. Le financement de la biodiversité est encore beaucoup trop faible comparé aux 12 milliards de subventions néfastes vers les activités qui la détruisent. Il est temps de stopper ces subventions, d’inverser les tendances, et surtout après la pandémie, de préserver ce capital naturel indispensable à notre santé globale.

Pour en savoir plus…

Stratégie nationale biodiversité