La Fonction Publique a de l’avenir

Le Premier Ministre avait saisi le CESE pour qu’il réfléchisse sur l’avenir de la Fonction Publique. La démarche pour être tardive, n’en était pas moins intéressante. Une commission temporaire avait été installée à cet effet et deux rapporteurs désignés, Michel Badré et Nicole Verdier Naves. Le texte voté rompt heureusement avec la caricature et les idées fausses que certains colportent à l’envi sur la fonction publique et affirme clairement son utilité et sa capacité adaptation.

 

« Les principes d’égalité, d’indépendance et de responsabilité des fonctionnaires apparaissent de nature à apporter les garanties indispensables face à une société de plus en plus complexe, de plus en plus fracturée et de plus en plus individualiste (…) Le CESE “estime que l’abandon (du) principe statutaire mettrait en cause les trois autres principes fondateurs, qui lui sont liés. C’est en effet le statut et la séparation entre la carrière et l’emploi qui permettent de garantir la responsabilité, l’indépendance et le traitement équitable du fonctionnaire-citoyen, tout en permettant à l’administration de maîtriser les affectations sur les emplois à pourvoir. Cela ne préjuge pas d’un examen particulier portant sur les emplois très spécifiques qui justifient l’appel à des contractuel(le)s, comme cela se pratique déjà.(…) Ce dernier (le statut) et son corolaire obligé, le principe d’adaptabilité, ont montré leur capacité à faire face à des enjeux d’évolution importants. Il n’est pas démontré que leur abandon apporterait d’avantage important, y compris en matière budgétaire. »

Ces quelques citations montrent clairement l’orientation qui traverse le texte. Elle repose sur l’affirmation sans ambiguïté du lien entre le statut, les principes qui le régissent et l’intérêt général; l’avis rappelle clairement que si les fonctionnaires sont régis par des règles en partie dérogatoires au droit commun c’est pour mieux répondre à des besoins fondamentaux de la société, qu’il s’agisse de cohésion et de justice sociales, de développement durable, de défi du numérique, de développement économique …

Il souligne la responsabilité des fonctionnaires dans l’exercice de leurs missions, et appelle à la prise en compte de l’expertise des agents et des usagers. Tout aussi important : s’il ne se prononce pas sur le nombre de fonctionnaires, parce que cette question ne figurait pas dans la saisine, il affirme clairement que la question des moyens ne peut se limiter à l’évaluation du coût à court terme mais que les choix faits en la matière doivent dépendre d’abord du débat sur les besoins et d’une évaluation de toutes leurs conséquences, sociales, économiques, environnementales.. , aussi bien dans l’immédiat que sur le long terme. Et il évoque la nécessité d’une gestion prévisionnelle incompatible avec des mesures brutales.

Il est fondamental qu’il montre que la Fonction publique s’inscrit dans une histoire longue sans pour autant être un monument figé. Et il ne se contente pas d’affirmer l’adaptabilité qui la caractérise : il fait des propositions pour la traduire encore mieux dans les faits en mettant en avant des démarches qui reposent sur le dialogue social, la formation continue, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, le développement d’une mobilité volontaire, l’innovation….On y retrouve des préconisations sur le maintien des concours, la création de pré recrutements, la consultation des usagers, des assises nationales et régionales des services publics..

Il est difficile en une page de faire l’inventaire de tous les points positifs dans ce texte très riche. Chacun pourra s’en rendre compte à sa lecture. Il existe bien sûr des manques, des sujets qui ne font pas consensus comme l’apprentissage, même si la balance penche fortement du côté du positif. La question centrale n’est pas là.

Cet avis en effet n’est pas une motion syndicale, encore moins un programme politique. Il est le résultat du travail, de la réflexion et du débat au sein d’une assemblée qui représente la société civile dans sa diversité d’intérêts et de points de vue . A un moment où certains se complaisent dans le « fonctionnaire bashing », les accusant tantôt d’être des budgétivores, tantôt leur reprochant d’être des privilégiés, tantôt leur opposant un prétendu immobilisme, il est essentiel de leur affirmer la confiance de la société dans leur statut et leur action et de leur redonner confiance dans leur mission. C’est précisément le mérite de cet avis.

Militants syndicaux, nous avons tout intérêt à le connaître, le faire connaître, en débattre et nous en servir dans les mois qui viennent, dans une période où les risques sont réels de coups dangereux contre la fonction publique.

par Gérard Aschieri

Pour lire l’avis, cliquez  ici.