Cannabis, vers une légalisation encadrée

Après avoir dressé un bilan des politiques publiques actuelles, après des débats importants, le CESE vient de se prononcer pour une légalisation encadrée du cannabis. Helno Eyriey, rapporteur de cet avis et représentant du groupe des organisations étudiantes et des mouvements de jeunesse, répond à nos questions sur les enjeux de ces travaux.

 

Pourquoi le CESE a-t-il choisi de traiter ce sujet ?

Les questions liées au Cannabis en France et plus particulièrement à son usage dit « récréatif » sont trop souvent abordées de manières clivantes et de manière réductrice. Alors que l’Allemagne va mettre en place une légalisation et que l’on commence à avoir un certain recul sur les expériences internationales de légalisation, le CESE a choisi d’aborder ce sujet qui impacte de nombreuses politiques publiques rentrant pleinement dans nos piliers thématiques. La commande initiale du bureau était « Cannabis : Bilan et évolution des politiques publiques ». Nous avons donc produit un rapport sur cette base puis abouti à un avis préconisant de sortir du statut quo pour aller vers une légalisation encadrée.

Quels ont été les débats les plus importants au sein de la commission ?

Ils ont naturellement été nombreux par rapport à un sujet aux implications multiples. Concernant les sujets de fond, nous nous sommes collectivement questionnés sur le niveau de détail d’une préconisation portant sur la tenue d’un débat large au sein de la société (qui pour l’organiser ? Quelles modes de consultations ? …) Ensuite, concernant les mesures d’urgence visant à réduire les injustices et incohérences pesant sur les personnes dans le système actuel, le temps de son évolution : des questions se sont posées sur la logique consistant à les déployer avant la mise en place d’une légalisation encadrée, ou alors légaliser tout de suite. Enfin il y a forcément eu des discussions autour de certaines mesures d’urgence et sur certaines modalités du « modèle souhaitable » que nous préconisons, afin qu’elles remplissent bien l’objectif prioritaire que nous avons collectivement établi, c’est à dire la santé publique, sans bien sûr banaliser les usages à risque.

Quelles sont les conditions proposées par le CESE pour une légalisation encadrée ?

Sur la base d’un constat solide faisant le bilan des modèles existants à l’étranger et des mesures existantes sur d’autres drogues aujourd’hui légales en France, nous préconisons la méthode et les mesures suivantes : tout d’abord le préalable indispensable consiste dans la tenue d’un débat large et dépassionné au sein de la société, s’appuyant sur des faits établis. Dans le même temps nous devons d’ores et déjà préparer la transition d’un système fondé sur la prohibition à un encadrement légal en coordonnant et en anticipant la mise en place de ce système par le développement de la recherche, la fin de la stigmatisation des usagères et des usagers, la sécurisation de la filière chanvre ou encore la création d’un organisme chargé la coordination des politiques sur le cannabis.

Enfin, ce modèle souhaitable que nous proposons s’appuie sur une démarche holistique intégrant l’ensemble des questions et impacts du sujet et le CESE préconise d’instaurer une logique sanitaire par une chaine de production et de distribution totalement transparente, bio et encadrée. Éviter une libéralisation de la vente du cannabis en ne créant pas de « géants » dans la filière, en encadrant strictement la publicité et l’accès aux points de ventes. Ils ne seraient accessibles qu’aux majeurs et leurs salariés seraient obligatoirement formés à la prévention et la réduction des risques sur le cannabis.

https://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Rapports/2023/2023_02_cannabis.pdf https://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Fiches/2023/FI02_cannabis.pdf