Bourgogne-Franche Comté

Dans le cadre de la commission formation, a été soumise au CESER la présentation d’une expérimentation régionale « parcours bac pro » permettant aux lycéens ayant déjà accompli deux années en filière lycée professionnel de passer l ‘année de terminale par la voie de l’apprentissage, en entreprise donc. Cette expérimentation concernerait 43 formations 353 jeunes et notamment les Bac pro plasturgie, industrie, agricole.

La Région argue du fait que le taux d’insertion professionnelle est supérieur dans la cadre de l’apprentissage , qu’elle permettrait une employabilité accrue….mais son objectif également affiché est d’augmenter le nombre d’apprentis dans la région BFC afin qu’elle puisse remplir ses objectifs, c’est aussi du pain béni pour les entreprises….Des concertations bien sûr ont déjà eu lieu avec les branches professionnelles( avec des échanges avec les autorités académiques cependant).

La FSU fut la seule organisation syndicale à se porter contre l’avis émis de la part du CESER. Voici la déclaration qui fut lue en séance par notre OS après que nous ayons relayé et sollicité les réactions du CFR Bourgogne Franche Comté :

« La FSU, première organisation syndicale de l’Éducation nationale, forte du soutien de la majorité des enseignant.e.s et de sa connaissance des réalités du terrain, votera contre l’avis et la mise en place de l’expérimentation 2+1 visant à généraliser la possibilité pour l’élève de poursuivre son année de terminale bac pro par apprentissage public.

Nous tenons tout d’abord à déplorer les délais impartis extrêmement courts pour émettre un avis sur un sujet éminemment important, la formation des jeunes et leur insertion dans le monde du travail. Il eût été préférable de se donner véritablement le temps de l’enquête et d’une réflexion aboutie afin qu’il ne subsiste aucune question sans réponse sur la faisabilité juridique de cette année sous double statut, et sur le fond, mise en place d’une concurrence directe avec la formation professionnelle sous statut scolaire et remise en cause de cette dernière.

Nous irons plus loin que ces réserves en tenant tout d’abord à dénoncer que ce dispositif n’a pas de fondement pédagogique, et qu’il ne se soucie pas de la réussite des jeunes, mais qu’il répond à une logique comptable et de productivité à moindre coût

Nous rappellerons ensuite quelques faits bien établis.

Une étude menée en 2017 par le Cereq et l’Injep (Centre d’études et de recherches sur les qualifications, Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire) montre que les chances d’accès à l’apprentissage sont inégales : pour signer un contrat d’apprentissage, mieux vaut être un garçon, français d’origine, d’un milieu social plus favorisé que la moyenne des élèves de lycées professionnels, et issu de familles d’artisans, de commerçants et d’indépendants, c’est-à-dire bénéficier d’un réseau de relations.

En l’état actuel, l’expérimentation que vous proposez aurait donc toutes les chances de donner d’excellents résultats pour les meilleurs élèves de première, qui trouveraient effectivement à signer un contrat d’apprentissage, mais pas les autres élèves, car telle qu’elle fonctionne actuellement, la formation en apprentissage reproduit ou renforce les inégalités de genre, sociales ou ethniques, ce que nous ne pouvons cautionner. Pour que l’apprentissage soit réellement efficace, il faudrait un accompagnement très poussé et individualisé de chaque jeune, ce que propose précisément la voie professionnelle sous statut scolaire, qui, elle, accueille tous les jeunes sans aucune discrimination.

Par ailleurs, nous contestons fermement l’idée reçue selon laquelle l’insertion des apprenti-e.s dans le monde du travail serait meilleure. C’est vrai à court terme, mais c’est faux à moyen et long terme, car les apprenti.e.s manquent de bases scolaires pour évoluer, réussir en formation continue et s’adapter au long de leur vie active. Dans la pratique, très peu d’apprenti.e.s poursuivent des études en BTS, au contraire des bacheliers professionnels, et cela va à l’encontre des objectifs d’élévation du niveau de qualifications des salarié.e.s de notre pays.

Enfin, à la notion d’emploi, liée à une entreprise donnée et à un moment donné, nous préférons la notion de métier : seul le lycée professionnel permet aux élèves de découvrir plusieurs facettes d’un même métier, par le biais de plusieurs PFMP (périodes de formation en milieux professionnels, c’est-à-dire par des stages d’une durée conséquente), le plus souvent dans des lieux différents, d’où ensuite une meilleure adaptation. »

Sandrine Carette