Outre-mer : la contribution du CESE

Le CESE a décidé de consacrer une plénière pour présenter deux textes concernant les Outre-mer: la résolution portant contribution aux Assises des Outre-mer, et un avis centré sur le tourisme durable, sur le changement de modèle de tourisme dans les Outre-mer. Dans un contexte particulier (Guyane 2017, crise à Mayotte; intempéries en Guadeloupe…), il a souhaité donner des priorités claires en rappelant que l’avenir des Outre-mer méritait un engagement fort de la nation pour réussir cette transition historique vers de nouveaux modèles de développement durable, respectueux des spécificités des territoires et des ultramarin.e.s.

Le CESE, dans sa résolution a souhaité mettre en avant 7 chantiers prioritaires : santé, logement, jeunesse, égalité femmes-hommes, transition numérique et écologique, biodiversité, développement économique.

L’accès à la santé et aux soins de qualité est un droit essentiel de notre pacte social et une condition de l’égalité réelle. Alors que le taux de mortalité infantile s’établit à 3,5 ‰ dans l’hexagone, il atteint 6 ‰ en Martinique, 6,6 ‰ à La Réunion, 7,9 ‰ à Mayotte, 8,3 ‰ en Guadeloupe et 8,8 ‰ en Guyane. Les Outre-mer souffrent de carences, en particulier à Mayotte, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et en Guyane, qui sont les plus grands déserts médicaux de France.  Au-delà d’un état des lieux indispensable, des mesures concrètes sont attendues. Le CESE a récemment préconisé la création de pôles de santé pluri- professionnels, le développement d’un réseau d’offre de consultations de premier recours, la télémédecine, ainsi que l’amélioration de l’accès aux soins urgents grâce au déploiement de médecins coordinateur.trice.s dans les dispensaires. Le renforcement de la prévention est une attente locale très forte.

Un deuxième axe préconise d’assurer un accès pour toutes et tous à l’habitat et au droit au logement. . Le CESE s’est interrogé sur l’objectif de construction de 150 000 logements sur les dix ans prévus par la loi . Il demande donc que les conséquences du rachat des parts de l’État par la Société nationale Immobilière soient évaluées en termes de construction par les délégations à l’Outre-mer des trois assemblées avant la présentation du budget 2020. Dans les collectivités d’Outre-mer, le CESE demande une contribution pérenne de l’État au financement du logement social.

Autre enjeu d’importance : assurer à la jeunesse ultramarine les conditions de son autonomie en renforçant les parcours de formation et d’insertion sociale et professionnelle. Le taux de chômage dans les départements d’Outre-Mer atteint le double de celui de l’hexagone (10,1 % fin 2016). il s’élève ainsi à 23,8 % en Guadeloupe, 17,6 % en Martinique, 23,3 % en Guyane, 22,4 % à La Réunion et à 27,1 % à Mayotte. Ce taux est encore plus important chez les 15-24 ans : à 44,4 % en Guadeloupe, 47,4 % en Martinique, 43,5 % en Guyane, 44 % à La Réunion et 44,5 % à Mayotte, dans les collectivités ultramarines, Saint-Martin affiche le taux de chômage le plus élevé de France à 33 % en 2013, tandis qu’il atteint 14,6 % en 2015 en Nouvelle-Calédonie et 21,8 % en Polynésie française en 2012. La moitié de la population ultramarine a moins de 30 ans. De ce fait, le CESE appelle à un nouveau Plan pour la jeunesse Outre-mer qui visera à investir prioritairement dans l’éducation, la formation professionnelle et l’apprentissage, avec un accompagnement individualisé et renforcé pour les jeunes en insertion.

L’égalité femmes-hommes est un enjeu majeur dans les Outre-mer. Le CESE a été à l’origine d’une prise de conscience importante avec l’avis Combattre les violences faites aux femmes dans les Outre-mer » « Le Tour de France de l’égalité » doit prendre en compte les territoires ultramarins car l’égalité professionnelle, le renforcement des droits sociaux des femmes, la lutte contre les violences et l’exemplarité de l’État sont des progrès attendus.

Autre défi :réussir la transition numérique des Outre-mer dans le sens de la performance sociale, économique et environnementale. L’accès au très haut débit et à la téléphonie mobile y sont indispensables Le gouvernement s’est engagé à réaliser une couverture de qualité généralisée en Outre-mer dans le même calendrier que celui du territoire hexagonal. Au-delà de la couverture réseau, le CESE a préconisé d’investir massivement dans la formation et l’accompagnement de tous les publics, des plus jeunes aux plus âgé.e.s, à l’accès aux outils numériques.

Ensuite pour faire des Outre-mer des territoires d’excellence de la transition écologique il est nécessaire d’augmenter les capacités de production locales pour tendre vers l’autonomie énergétique.. La production d’énergies renouvelables représente déjà 27 % de la production électrique des départements et régions d’Outre-mer, jusqu’à 62 % en Guyane et 36 % à La Réunion. Dans la perspective de la loi de transition énergétique du 17 août 2015 qui fixe les objectifs ambitieux d’une production énergétique pour moitié renouvelable en 2020 et d’une autonomie complète en 2030, les nombreux projets locaux dans les domaines du solaire photovoltaïque et thermique, de la biomasse et de la géothermie, de l’éolien, de l’énergie thermique des mers et la technologie Swac de climatisation par les eaux profondes représentent des atouts. Le CESE préconise de renforcer les fonds budgétaires de l’État destinés à faciliter la transition énergétique et l’adaptation des territoires ultramarins face aux conséquences du réchauffement climatique. Par ailleurs les Outre-mer représentent 87 % de la biodiversité française : phénomène exceptionnel Le CESE souhaite que les efforts de protection, de recherche et de valorisation des ressources génétiques de la biodiversité ultramarine soient une priorité du développement économique de ces territoires .

Enfin, dernière préconisation : faire du développement économique et de la compétitivité des entreprises des atouts pour la création de richesses. Avant toute nouvelle prise de décision, pour le CESE les dispositifs d’aides fiscale et sociale doivent être évalués, de manière globale, par territoire et par secteur d’activité. Ces évaluations devront être rendues publiques et soumises à une consultation afin de permettre aux partenaires sociaux de faire des propositions pour un nouveau cadre de développement stable et pérenne. L’effort financier de l’État devra être mieux délimité

Enfin, le développement d’un dialogue social efficace, de qualité est nécessaire car il constitue un facteur d’équilibre et de dynamisme. Lors de la négociation d’une convention ou d’un accord à champ d’application national, le CESE recommande la consultation préalable des organisations reconnues représentatives au niveau local dans les départements d’Outre-mer, notamment sur l’adaptation aux conditions locales des clauses de la convention ou de l’accord Les partenaires sociaux doivent être consultés avant toute modification à venir du cadre législatif visant à redynamiser les économies ultramarines. Espérons que cette préconisation soit entendue et reprise partout car elle est vraie pour l’ensemble des territoires.

Par Eliane Lancette

pour lire l’avis portant contribution aux assises des Outre mer ici

pour lire l’avis « promouvoir un tourisme durable dans les Outre mer ici