Dialogue social : une question de culture ?

Le Cese a émis un avis concernant  » le développement de la culture du dialogue social en France ». Le texte voté contient un certain nombre de préconisations intéressantes. Mais, limité par son sujet et par les délais impartis, il a pour défaut de donner le sentiment de réduire les problèmes du dialogue social à des questions -certes importantes- de formation et de culture, en esquivant par exemple les conséquences sur ce dialogue de la financiarisation croissante de l’économie et de la prédominance de la pensée néolibérale.


 

Le CESE a été saisi par le Premier Ministre en février dernier d’un projet d’avis concernant » le développement de la culture du dialogue social en France ». Sa commande intégrait cette saisine « dans le processus issu des travaux de Jean Denis Combrexelle et de Robert Badinter et du projet de loi » Travail « ainsi que des travaux de refonte du Code du Travail programmé sur une durée de 2 ans », l’avis du Conseil devant être recueilli « avant la fin du mois de mai ».

Le texte voté contient un certain nombre de préconisations intéressantes mais, limité par son sujet et par les délais impartis, il a pour défaut de donner le sentiment de réduire les problèmes du dialogue social à des questions -certes importantes- de formation et de culture, en esquivant par exemple les conséquences sur ce dialogue de la financiarisation croissante de l’économie et de la prédominance de la pensée néolibérale.

Dès le début, deux facteurs ont pesé de façon très importante sur le déroulement des travaux de la section Travail/Emploi.

Le premier était le facteur temps puisque de façon exceptionnelle dans les modalités de travail du CESE et sur un sujet, le dialogue social, aux enjeux politiques et sociaux déterminants, la construction de l’avis a été soumise à une contrainte temporelle très réduite. Les échanges approfondis, les confrontations, les recherches de constructions de points d’accords, l’exercice de l’inventivité n’ont pu se déployer autant qu’il aurait été nécessaire. L’imposition à l’Assemblée Nationale de la procédure du 49.3 a par ailleurs télescopé le déroulement des travaux, rendant l’intervention du CESE beaucoup moins pertinente.

Le deuxième facteur a été le contexte politique et social déclenché par le contenu de la loi Travail qui a lourdement pesé. Depuis plus de 2 mois un mouvement social inédit se développe articulant pétitions, grèves et manifestations. Ainsi « le risque d’instrumentalisation du CESE » a pu être évoqué.

Toutefois l’avis, piloté par Luc Bérille (groupe UNSA) et Jean François Pilliard (groupe des personnalités qualifiées), contient 36 recommandations dont certaines présentent des avancées intéressantes.

En particulier la recommandation 21 qui préconise « de reconnaitre au conseiller du salarié.e (de manière complémentaire aux dispositifs existants), une mission de conciliation pendant l’entretien préalable de licenciement« . Ainsi est franchi un pas de plus dans la reconnaissance de la présence syndicale au sein des TPE.
La recommandation 23 quant à elle marque un processus d’élargissement du dialogue social à la sphère associative et militante non classique de la société civile. La formulation retenue précisant le souci… » du développement de formes de dialogue social de conGroup of people discussing in a meetingcertation à des acteurs représentants la société civile sur des sujets transversaux« . On peut penser par exemple qu’ainsi s’exprime un accord sur la consultation des organisations de chômeur.se.s lors de la négociation de la Convention Unedic. Toutefois la conclusion de la recommandation stipule que « les modalités de cette ouverture sont complexes et devront être précisées, en éclaircissant notamment la question de l’identification des acteurs« .

Par ailleurs un ensemble de préconisations vise à mieux intégrer les questions des droits sociaux, du rôle des syndicats et du dialogue social dans la formation des jeunes et surtout à systématiser des modules de formation en ce domaine dans le cursus des futurs cadres tant du privé que de la fonction publique.

Mais nombre d’intervenants ont exprimé leur insatisfaction devant un avis trop contraint pas les délais et son périmètre. La conclusion du texte a cependant permis à l’avis d’être adopté par 147 pour / 5 contre et 27 abstentions car il inscrivait nettement que « certains sujets majeurs devront faire l’objet de travaux ultérieurs à l’initiative de notre assemblée comme par exemple, l’impact du numérique sur l’exercice du dialogue social, la question du droit syndical ou encore la question de l’ouverture du dialogue social à d’autres acteurs ».

Texte de l’avis, synthèse, et autres éléments, ici 

Par Noel Daucé, juin 2016