Comment accélérer la transition énergétique?

L’avis intitulé « Comment accélérer la transition énergétique ? » présenté par Guillaume Duval et Madeleine Charru au nom de la section de l’environnement est bâti autour d’un premier bilan de la mise en œuvre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) votée en 2015.  Comme l’a dit Isabelle Autissier dans son intervention, il s’agit une fois de plus « du sujet du siècle, la lutte contre le réchauffement climatique », peu d’années après les résolutions adoptées par la COP21 et son objectif de limiter à 2 degrés le seuil du réchauffement climatique. Or malgré les 178 textes découlant de la LTECV, le bilan est tout à fait préoccupant.

Loin de participer à l’objectif « de diviser par quatre, les émissions de gaz à effet de serre du pays d’içi à 2050 » , « ceux-ci ont augmenté de nouveau en 2015 et 2016 ». « La consommation énergétique des transports » ne fléchit pas. « La rénovation énergétique dans le secteur du logement et du tertiaire est « loin d’être atteinte » pour ne prendre que ces deux domaines d’application. « La France demeure un des pays d’Europe les plus en retard sur les objectifs fixés pour 2020 en matière de déploiement des énergies renouvelables ». Par ailleurs il existe des problèmes concernant les moyens qui ne sont pas à la hauteur des défis auxquels nous sommes confrontés et dont la stabilité est aléatoire. D’autre part, « le pilotage national n’est pas optimal » et se pose la question de la cohérence des actions et programmations malgré les deux outils majeurs que sont la Stratégie nationale bas carbone(SNBC) et le Plan pluriannuel de l’énergie(PPE).

La responsabilité des territoires et des collectivités locales a été reconnu comme centrale dans la mise en œuvre concrète de la LTECV. Mais confrontés « à la rigueur budgétaire accrue », des difficultés à poursuivre leurs actions sont à redouter.

Par-delà les faiblesses de la loi elle-même, le CESE préconise des changements dans 5 domaines principaux.

  1. Se fixer des objectifs réalistes dans tous les domaines essentiels et s’y tenir.

Réduire la part de l’énergie nucléaire, avec un plan permettant d’atteindre l’objectif de 50% d’électricité d’origine nucléaire avant 2035. Donner davantage de priorité aux alternatives au transport routier individuel (transports en commun, covoiturage, ferroutage, télétravail…) ce qui a une résonnance particulière à l’heure de la refonte de la SNCF préconisée par le gouvernement. « Les questions agricoles et alimentaires sont centrales tant pour l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050 que pour le développement d’une bioéconomie durable ».

2.  Mettre les moyens à la hauteur de l’enjeu de manière stable et prévisible.

Dans le cadre du Grand plan d’investissement, porter les engagements financiers de 20 Milliards (promis) à 35 Milliards. Financements et dispositifs doivent s’inscrire dans la durée. Une loi de programmation serait un outil à proposer. « Un débat doit s’engager au niveau européen pour que le financement destiné à la lutte contre le changement climatique, puissent être, dans certaines conditions, exclus des critères de déficit et de dettes publics dits de Maastricht ».

3. Se mettre en ordre de marche pour engager une rénovation efficace des bâtiments.

Déployer d’urgence un service public de la performance énergétique de l’habitat (SPPEH). Priorité absolue à l’élimination des passoires thermiques occupées par les ménages pauvres. L’Etat doit montrer l’exemple en rénovant rapidement ses propres bâtiments…

4. Lever les obstacles au développement des énergies renouvelables.

Lever les freins concernant « l’hydraulique, le solaire, l’éolien ou la méthanisation » notamment en raccourcissant les délais d’agréments, en diminuant les exigences administratives, en améliorant les raccordements de réseaux…

5. Faciliter l’engagement de tous les acteurs.

Attribuer aux régions et établissements publics de coopération intercommunale des moyens dédiés à la transition énergétique. Faciliter le développement d’un tissu dynamique d’entreprises de toutes tailles dans les différents domaines concernés. « La dimension emploi et formation » fortement créatrice d’emploi doit être pleinement prise en compte.

Au final deux questions ont soulevé des débats contradictoires qui se sont ressentis dans les votes de l’Assemblée. La première concerne la place du nucléaire dans le mix énergétique et le choix fait d’un plan volontariste de diminution de cette énergie. La deuxième liée à ce choix est le développement des énergies alternatives avec une localisation territoriale décentralisée. Cette option a suscité des questionnements sur le fait que cela pourrait provoquer un risque de déstabilisation pour la centralité et le monopole D’EDF et d’ENEDIS.

Cet avis extrêmement intéressant et adapté aux urgences climatiques, avec son regard lucide et exigeant a été adopté par 106 POUR/ 22 CONTRE/ 27 ABSTENTIONS.

Par Noel Daucé

pour lire l’avis ici