Citoyen.ne.s, chercheur.euse.s : faut qu’on s’parle !

L’actualité autour du climat avec les rapports du GIEC, la COP 21 et l’accord de Paris montrent  l’urgence de l’action en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Ils témoignent de l’indispensable réorientation de notre mode de développement vers une société sobre puis neutre en carbone et de la nécessaire implication des citoyens dans ce domaine.

La recherche dans toutes ses dimensions apparaît comme un enjeu majeur des réponses collectives aux questions climatiques, elle suscite un large intérêt qui offre l’opportunité, voire l’absolue   nécessité   d’un dialogue sciences-société renforcé et continu associant chercheur.euse.s, décideur.euse.s politiques, acteur.rice.s de la société civile organisée et des citoyen.ne.s. Cette urgence a conduit le CESE à s’auto saisir de cette question et d’éditer un avis « Sciences et société : répondre ensemble aux enjeux climatiques » avec pour objectif de développer les interactions entre la communauté des scientifiques du climat et la société de tenter d’établir entre les deux un dialogue véritable. Le CESE propose  de nombreuses modalités comme  la création de lieux de dialogue ou le  développement de projets coconstruits, en passant par les modalités de la gouvernance. Au niveau territorial, un processus d’échange et de rencontre entre les acteur.rice.s de la recherche et ceux.celles du monde économique s’avère particulièrement nécessaire.

Le premier axe consiste à renforcer les liens entre les chercheur.euse.s et les décideur.euse.s politiques par la création au niveau du Président de la République et sous son autorité, en s’inspirant de l’exemple du Royaume-Uni, un poste de « chief scientist », qui serait confié à un.une chercheur.euse de haut niveau, internationalement reconnu.e. Ensuite il pourrait être envisagé une évolution de l’OPECST (Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques) vers une instance composée de membres des trois assemblées (Parlement et CESE), pour répondre à leur besoin commun d’analyse des choix scientifiques et technologiques, cela nécessiterait de définir clairement les objectifs donnés à cette « nouvelle » instance… Le CESE propose enfin d’encourager les chercheur.euse.s français.e.s à s’impliquer et si possible à renforcer leur présence dans le processus du GIEC, et leur assurer un soutien financier spécifique des ministères concernés. Il manque cependant les mesures concrètes à mettre en œuvre pour favoriser cette implication.

Le deuxième axe consiste à améliorer le dialogue entre les acteur.rice.s économiques et la communauté scientifique par la simplification  des démarches d’appels à projets pour les PME afin de renforcer les opportunités de création de projets collaboratifs concernant tout particulièrement l’accès aux services climatiques. Dans ce cadre les chambres consulaires sont invitées à accroître leur contribution par un meilleur  contrôle des liens d’intérêt des chercheur.euse.s en instaurant une déclaration systématique de tous les liens, financiers ou non, existants entre ces dernier.ère.s et les industriel.le.s. Enfin il s’agit d’organiser  un dialogue permanent entre la communauté scientifique et les acteur.rice.s de l’entreprise sur le développement des services climatiques.

Le troisième axe consiste à développer grâce aux sciences citoyennes le dialogue entre citoyen.ne.s, associations et communauté scientifique en valorisant les savoirs d’expérience, d’usage ou l’expertise citoyenne en les mobilisant plus systématiquement dans la construction des projets de recherche sur le changement climatique et les démarches scientifiques dans les territoires. Pour cela il est indispensable de développer dans les universités et organismes de recherche une mission « recherche participative » fondée sur un partenariat avec des associations afin de favoriser les échanges science citoyenne – science académique. Le CESE propose également de multiplier les expériences d’évaluation de la recherche par une communauté de pair.e.s étendue aux non-scientifiques.

Le quatrième et dernier axe préconise d’organiser et territorialiser le dialogue en facilitant en temps et en moyens les efforts des chercheur.euse.s pour établir et maintenir des liens avec la société. Pleinement reconnaître et valoriser ces efforts dans la formation doctorale, comme dans le déroulement de leur carrière. Cela pourrait prendre la forme de regroupements d’universités, d’écoles et d’organismes de recherche à devenir des lieux de débat en territoires associant scientifiques et représentants de la société civile sur les politiques d’atténuation et d’adaptation au changement climatiques. Dans ce cadre les CESER doivent utilement être associés. Cela pourrait également passer par le souci de faire émerger des mécanismes de saisine directe des organismes de recherche et des universités par les citoyens et leurs différentes formes d’organisation et enfin de faire bénéficier des projets de recherche dans le domaine des sciences climatiques, qui développent une dimension de dialogue sciences-société, de financements dans la durée.

L’avis « Sciences et société : répondre ensemble aux enjeux climatiques » a été adopté le 11 octobre  par  162 voix pour et 14 abstentions.

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Eliane Lancette